La cathédrale Saint-Laurent de Viterbe, située sur la place dédiée au saint protecteur de la ville, offre sur celle-ci une façade du XVIe siècle, bordée par un clocher gothique et par le palais des papes du même style, symbole du passé prestigieux de la ville. Le visiteur habitué aux églises romaines, sera donc étonné de découvrir un intérieur roman très sobre, et le sera encore plus si il visite l’intérieur après avoir observé le chevet de l’édifice. En effet, l’abside peu profonde cache un chœur baroque, auquel on accède par deux petites portes.
La façade de la cathédrale Saint-Laurent a été totalement reconstruite au XVIe siècle. De la façade romane, deux roses de pierre ont été conservées, dont une est visible sur le mur des chapelles latérales (sur la photo).
Le rajout du choeur baroque au XVIe siècle est parfaitement lisible sur la cathédrale.
Le territoire de Viterbe a été lié à la papauté. Occupé par les étrusques, puis passé sous la domination successives des romains, des goths, des byzantins, des lombards, des francs, il a fini par entrer sous l’autorité des papes au IXe siècle. La ville a commencé à s’étendre deux siècles après, pour devenir assez importante lorsque le pape Eugène III, cherchant alors à fuir l’insécurité de Rome, décida d’y installer son siège en 1145. C’est d’ailleurs lors de son séjour, que celui-ci a planifié la deuxième croisade, entreprise en grande partie par le roi de France Louis VII, et qui est probablement une des causes de la rupture de son mariage avec Aliénor d’Aquitaine, entrainant les conséquences que l’on connait… Retournons à Viterbe, qui ne fut pas toujours fidèle au pape… Celle-ci accueillit l’antipape Pascal III, candidat de l’empereur romain germanique Frédéric Barberousse qui refusait alors de reconnaitre le pape romain. En contrepartie, la ville obtint le titre de cité de la part de ce souverain en 1167. Cinq années plus tard, la destruction de la ville voisine de Ferento (ancienne cité antique) mets fin au long conflit entre les deux villes et marque le début du développement de Viterbe qui a annexé ses territoires.
La cathédrale est consacré officiellement en 1192 et devint le siège d’un diocèse. Le siècle suivant est probablement le plus glorieux de l’histoire de la ville. En effet, le pape Alexandre IV décida de transférer la cour papale de Rome à Viterbe en 1261, toujours à cause de l’insécurité. Un des faits marquants de cette période est la mort du pape Clément IV en 1268, qui inaugura une des plus longues périodes de « Sede vacante » (Temps durant lequel la tête du Saint-Siège (ou d’un diocèse) est vacant). Cet évènement est à l’origine de l’instauration du Conclave. Pendant pratiquement trois ans, de nombreuses tractations ont eu lieu dans le palais des papes et aboutirent finalement sur l’élection de Grégoire X. Trois autres papes seront ensuite élus à Viterbe, le dernier, Martin IV, choisissant en 1281 de déménager la cour papale à Orvieto (environ 40km au nord). Alors que Viterbe était le siège pontifical, la cathédrale, construite le siècle précédent et bien que devenue le théâtre de nombreux évènements, ne connut pas de travaux marquants.
Fresques de Giuseppe Passeri, la partie centrale est ornée par saint Laurent et la voûte en cul-de-four par un Christ en gloire.
Le tableau au-dessus du maitre-autel représente la gloire de saint Laurent.
Ceux-ci commencèrent à la seconde moitié du XIVe siècle, avec la reconstruction du campanile dans le style gothique. Puis lors des deux siècles précédents, avec la restructuration et l’agrandissement de la cathédrale. Ce fut également à ce moment que la façade romane fut détruite, puis reconstruite afin de l’adapter au reste de l’édifice et aux goûts de l’époque. Les travaux qui nous intéresse ont lieu en 1560, quand l’évêque Sebastiano Gualterio fait démolir l’abside centrale romane, afin de construite un chœur plus profond. Ce dernier est décoré en 1683 par les fresques du peintre Giuseppe Passeri, dont la partie centrale représente saint Laurent entouré de la personnification des vertus, alors que la voûte en cul-de-four est ornée d’un Christ en Gloire entouré de plusieurs saints, dont Pierre et Paul. Le maitre-autel est surmonté par un tableau, réalisé en 1648 par Giovanni Francesco Romanelli, qui travailla également pour le cardinal Mazarin à Paris. Il représente la gloire de saint Laurent, tenant une palme dans sa main droite (symbole du martyre) et avec un gril à ses côtés (instrument de sa torture).
L’abside rajoutée après la guerre couvre une partie du décor peint de la voûte.
Au XVIIe siècle, ont également lieu des travaux dans la nef avec la réalisation d’une voûte et la transformation des fenêtres, qui finiront par masquer les dernières traces de l’église médiévale, qui ne seront redécouvertes qu’après la seconde guerre mondiale. Durant celle-ci une bombe tomba sur la cathédrale, endommageant sérieusement l’édifice mais rapportant à la lumière son aspect antérieur. Lors de la restauration, le choix a été fait de retrouver et de montrer l’état roman, entrainant la suppression de tout le décor en stucs, la fermeture des chapelles latérales datant du XVIe siècle et surtout celle du chœur baroque afin de retrouver le volume d’origine de l’église médiévale.
Le chœur baroque est totalement caché par l’abside « romane »qui permet de retrouver le volume médiéval originel.
Les traces laissées par la bombe qui a explosé avant de toucher le sol de la nef en 1944, sont encore visibles sur les colonnes.
Non loin de Viterbe, je vous conseille d’aller vous balader dans le parc des monstres de Bomarzo datant du XVIème siècle.